lundi 13 octobre 2014

Deux textes en réponse à un défi

Me revoilà avec deux petits textes écrits suite à un défi par un ami (qui devait écrire lui aussi et qui ne l'a jamais fait) en fin seconde, donc qui date d'été 2012. 
Je vous donnerai la consigne en fin d'article, histoire de ne pas détruire l'effet de surprise. 
J'ai choisi un point de vue particulier sur les textes, en adoptant un ton plutôt poétique parce que je ne maîtrise pas du tout le sujet du défi (qui peut être assez technique, et le manque d'info facilement compréhensible a eu raison de mes recherches)



L'oiseau


Le vent chaud soulevait le sable et la poussière en de petits tourbillons. Figé le nez vers le ciel, l’Oiseau attendait. Ses ailes tendues fourmillaient de sentir les courants d’air les porter, ses yeux aveugles fouillaient l’amas des cumulus, avides de s’en approcher.

Sur le sol, des petits pucerons s’agitaient. Enfin, il allait pouvoir recevoir l’énergie nécessaire pour pouvoir décoller, apportée par ces petits pucerons ! Enfin il reverrait l’étendue bleue, le ventre grouillant de ces petits pucerons ! Enfin il se sentirait libre, après cette pose forcée en plein désert, sous ce hangar en métal brûlant ! Enfin ! Enfin…
Pendant vingt ans, il a sillonné les airs, bravant la chaleur, le froid, le vent, la pluie, la neige, et même, une fois, la tempête.
C’était en décembre, il y a une dizaine d’années. Il s’était élancé dans les cieux, déterminé, le ventre plein de ces petits pucerons. Et puis, le vent s’était levé, alors qu’il volait tranquillement depuis un moment, fendant le ciel de sa noire silhouette. Les nuages s’étaient amassés, sombres et menaçants. Mais, lui, infaillible et confiant, continuait sa route. Mais par la suite, le vent avait forci et l’avait malmené. Des bourrasques imprévisibles le soulevaient ou le frappaient sur le côté. Il tentait, vaillant, de garder le cap, sans faiblir. La pluie le fouettait, réduisait sa visibilité, le détrempait entièrement. Il volait en plein brouillard, sans voir où il allait, guidé par un instinct primaire. Le soir, il se posa exténué sur le sol, n’ayant même pas un regard pour la ville illuminée, courageux soldat qu’il était et qui avait conduit les pucerons à destination.
Après avoir vécu de telles aventures, comment accepter de rester sur le sol, contraint de tutoyer les nuages seulement du regard ? De ne plus sentir l’air s’ouvrir devant soi ? De ne plus dominer le sol ?

Les pucerons s’affairaient autour de lui. Enfin… mais quelque chose clochait. On ne lui avait pas remplit l’estomac ! Et on commençait à l’ouvrir ! Il comprenait. C’était une opération. Mais pourquoi ?
D’accord, on l’avait déjà opéré, pour le soulager de certains maux, comme quand un de ses vaisseaux conducteurs d’énergie avaient été endommagé, ou qu’un de ses muscles principaux, l’un de ceux qui lui permettaient de voler ne répondait plus correctement… mais là… Mais là, il se sentait parfaitement en forme. Ses articulations étaient certes un peu rouillées, et son système un peu plus lent, mais il ne voyait pas l’intérêt d’une opération.
Pourtant, les pucerons fouillaient dans le corps majestueux de l’Oiseau, échangeaient des paroles et des outils, dont l’utilité et le sens échappaient au géant des cieux.
Ils extirpèrent de la cavité qui occupait la plus grande partie de son corps une multitude de petits morceaux utilisés par d’autres pucerons. Chaque morceau qui lui était enlevé se faisait  douloureusement sentir en lui, comme si ils lui arrachaient une par une ses terminaisons sensibles.
Puis, les pucerons s’affairèrent à l’extérieur.

Les pucerons commencèrent à enlever la peau de l’Oiseau, par endroit. Celui-ci ne comprenait pas. Pourquoi… ?

Et soudain, il comprit.
On le démembrait.
On le tuait.
Il allait mourir.

Les pucerons enlevèrent la peau de l’Oiseau, puis s’attaquèrent à son système.
La fin était proche. Il le sentait.
Ses terminaisons ne répondaient plus, il ne percevait plus son corps.
Il jeta un dernier regard aux nuages blancs qui passaient sans se presser, sous les rayons solaires de la fin d’après-midi.
Les pucerons lui arrachèrent son système, action définitive.
Il partit pour son dernier voyage, laissant derrière lui son corps lourd et endommagé.

Le soleil se coucha, embrassant de ses dernières lueurs la carcasse abandonnée de l’Oiseau, sur une ossature claire, dernier vestige d’un géant



Demain, les mécaniciens viendront enlever la structure métallique de l’avion démonté pendant l’après-midi de l’hangar 6.


L'amant du vent


Le mécanicien essuya ses mains noires de gras sur son bleu de travail.
Un moineau se posa sur le sol desséché, sous le regard vide du Géant d’Acier.
La main de vent du ciel caressa son amant de métal.

Le mécanicien vérifia ses outils.
Le moineau sautilla à l’ombre du Géant d’Acier.
Le ciel murmura une petite mélodie à son amant muet.

Le mécanicien commença à faire son travail, entouré par une dizaine d’autres mécaniciens.
Le moineau s’envola à l’écart des souliers lourds et luisants qui foulaient le sol.
Le vent s’entoura autour de son amant immobile, comme pour le protéger.

Le mécanicien suait sous le soleil brûlant, en maniant avec dextérité ses outils.
Le moineau survola le Géant d’Acier, se laissant planer, porté par l’air chaud.
Dans un geste dérisoire de protection envers son amant passif, le ciel se plaça entre les hommes et son amant.

Le mécanicien regardait sa montre, pressé.
Le moineau joua un moment en tournant autour du Géant d’Acier.
Le vent murmura quelques mots de réconfort à son amant condamné.

Le mécanicien rangea ses outils, content d’avoir terminé le travail.
Le moineau s’en alla rejoindre d’autres moineaux.
Le vent cherchait désespérément son amant perdu.

Le mécanicien raconta sa dure journée de labeur à sa famille, fier du travail accompli.
Le moineau s’envola vers d’autres horizons, délaissant le Géant d’Acier au fond de sa mémoire.
Le ciel, seul, pleura son amant disparu.
  

Peut-être l'auriez-vous compris, le sujet du défi était "le démontage d'un avion/la fin de vie d'un avion)
(J'ai déjà publié ces textes sur ce site)
Bisous!
Aile 1

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